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Poèmes Personnels

 Chanson de la folle au bord de scène 

sur une pièce de Charles Valentin Alkan


 

 

 

Dans un petit théâtre pauvre en France
où chaque soir elle jouait la folle
devant un parterre paumé en partance
sous la lumière étrange qui flageole

Moi je savais que les mots qu'elle disait
étaient plus vrais que la littérature
mais quand après le public repartait
elle restait là c'était son aventure

Je l'ai vue rire et je l'ai vue pleurer
danser ses amours et chanter sa peine
certains mal à l'aise se grattaient le nez
moi j'ai bu sa joie j'ai mangé sa haine

Elle était en feu dans ce coin tout froid
à crier de fièvre qu'elle voulait vivre
à gueuler la vie à trembler d'effroi
à être un soleil et moi j'étais ivre

Puis à la fin au milieu des acteurs
et des flons flons qui la faisaient valser
elle tombait morte chaque soir à la même heure
et les lumières doucement revenaient

Un jour pourtant elle ne s'est pas relevée
la salle non plus ne s'est pas rallumée
je crois que le théâtre a du fermer
peut-être bien qu'cà c'est mal terminé

Je viens souvent sur le trottoir d'en face
dans le bistrot je bois des blancs cassis
j'attends de la voir au fond de la glace
oh la folle mon amour reviens js'uis fou aussi

Oh la folle mon amour reviens js'uis fou aussi !

 

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