Alors voici les gosses les gamines les nymphettes
fleurant bon le savon et leurs cheveux lavés
vous regardant l'œil chaviré
la paupière cernée de leurs jeux enfantins
ce que je fus cruel envers elles
pardon !
-mets toi nue -dévêts toi -ôte tes vêtements ...
besoin d'œuvrer bien vite tant elles changent d'avis
elles donnent envie de viol et viennent pour jouer
à avoir peur
et c'est si émouvant de partager leur crainte
dans leur regard mouillé c'est le désir de lire
dans l'œil du peintre l'émoi de leur candeur
corps de vierges seins naissants croupes dures
et puis le satiné doucereux des épaules
quand on les accompagne sur les lieux du supplice
elles savent la rareté de leur instant de pose Une lettre
j'étais venue poser pour toi voilà dix ans
je suis maman ce soir
j'ai donné à mon fils ton prénom
que deviens tu ? as tu toujours mes toiles ?
où tu m'as faite si belle pour la première fois Encore
en voici d'autres qui papotent entre elles
dames mariées venues gérer là leur ennui
-Non pas de téléphone je vous appellerai !
c'est bon s'encanailler dans l'atelier d'un peintre
-Mes fantasmes dites vous ? Etre attachée
on fait de curieuses toiles avec ces assoiffées
vous amenant leur fille par un temps de vacances
-Mets toi nue mon enfant ... elle a de très beaux seins
avez vous vu ses fesses ?
(claque de la maman pour faire rosir la croupe)
-Bien sûr ... (à mon oreille) elle est vierge !
- si vous aimez la mère vous aurez bien l'enfant - J'ai fini mon
dessin
reste une page blanche
pour les vraies voix qui ont chanté à mon oreille
... les petites sœurs du peintre
elles étaient pauvres
elles étaient riches de leur tristesse
souvent on dînait à crédit à la cantine de ma rue :
l'indien de service !
elles ... n'étaient payées que parfois et s'en foutaient :
j'étais le peintre ...
elles ... que j'habillais au "décrochez moi çà"
- puces de Montreuil -
... un vieil astrakan déplumé
on s'embrassait devant une frite
pas d'homme pas de femme entre nous :
-ça va tes amours ?
-Bof ....
vous avez dit bohème ?
oui : du cœur et de l'âme
et c'était vrai
comme les toiles brossées d'elles
qui ne sont plus à vendre |